Une mémoire de la Seconde Guerre mondiale en NC
Petit parcours mémoriel dans Nouméa
Présentation de la démarche
Afin de préparer la leçon consacrée à la Seconde Guerre mondiale, les élèves ont été accompagnés au CDI afin de compléter le travail initié en début d'année autour de l'élaboration de la frise chronologique de la Nouvelle-Calédonie. Pour ce faire, nous nous appuyons dans un premier temps à la fois sur le manuel d'Histoire-Géographie publié par le Centre de Documentation Pédagogique de NC et sur sur notre pirogue.
La frise chronologique
Sur celle-ci, nous y retrouvons des éléments utiles pour notre compréhension de la période, en particulier en ce qui concerne De Gaulle et la France Libre d'une part, et la transformation de la NC en tant que base arrière alliée par les Américains d'autre part.
Ultérieurement, des binômes sont constitués qui permettent aux élèves de travailler sur la Seconde Guerre mondiale. Une fois les travaux corrigés, ils sont exposés au CDI, complétés par des réalisations similaires créées avec une autre classe.
L'exposition
Sortie à Nouméa - Le parcours de visite
Le binôme en charge de la carte présente le parcours de visite suivi par notre autocar en précisant les arrêts réalisés.
Aller sur le terrain, voir, regarder, s'interroger, sont des aspects indispensables de la compréhension de ce qu'a été la Guerre pour notre territoire et sa population. Mais ces lieux de mémoire et de commémoration que nous avons décidés de visiter lors d'une sortie pédagogique nous en disent bien plus.
Le parcours mémoriel : la vidéo
Présentation des lieux visités
De nombreux sites permettent d'en savoir plus sur la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie. Mais entre contraintes matérielles et choix pédagogiques portés par le projet mémoriel, nous avons sélectionné quelques-uns des sites les plus emblématiques de la ville de Nouméa. Revue de détail.
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Aérodrome de Magenta
Un ancien hippodrome transformé dès 1942 en base aérienne majeure de la Poppy Force, la division américaine implantée en NC. Devenue un lieu essentiel du dispositif de défense aéronavale, elle accueille des chasseurs et des bombardiers, permettant également le montage de nombreux avions reçus en kit depuis les Etats-Unis. Mais cet aérodrome, s'il est le plus important, n'est pas le seul à avoir été construit en NC par les Américains durant la guerre.
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Anse Vata
L'ancien État-major des forces américaines : le Pentagone.
La base du mât des drapeaux rappelle ce passé. Une fois les Américains partis, le bâtiment accueille la CPS ( Communauté du Pacifique Sud) avant d'être détruit et remplacé par un projet immobilier dédié au tourisme.
A noter que le général Patch, qui commandait les troupes, était installé bien plus loin dans l'ancien Grand Hôtel du Pacifique ( voir reportage sur NC1 ).
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L'hôpital militaire
De nombreux hôpitaux militaires sont construits à Nouméa pendant la guerre. C'est notamment le cas du Naval Mobil Hospital situé juste en face du Quartier Général, contenant 1 000 lits soit quasiment 5 fois plus que la capacité hospitalière de la ville. Les soldats américains blessés durant les combats dans le Pacifique y sont soignés avant leur rapatriement aux Etats-Unis. Après la guerre, ces structures en bois accueillent la polyclinique de l'Anse Vata, fermée définitivement en 2018.
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Receiving
Plusieurs campements militaires organisent le quartier du Receiving. Situés en arrière de la côte et du Pentagone, les soldats y trouvent de quoi se nourrir et se reposer dans les demi-lunes. A noter qu'en se rapprochant de la Baie des Citrons, on trouve le camp Goettge, le campement des Marines. Mais le nom de ce quartier vient de la station radio installée durant la guerre ("Receiving station"). Photographie aérienne de 1954.
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Eglise du Vœu
L'histoire d'une promesse et un hommage aux Américains.
En 1943, le vicaire Monseigneur Bresson fait un vœu : celui de construire une église sur les hauteurs du Receiving si la Nouvelle-Calédonie est épargnée par la guerre. En 1949, les travaux sont engagés. Quatre ans plus tard, la première messe est célébrée dans cette nouvelle église.
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Motor Pool
Arrivés avec leurs camions et leurs Jeeps, les Américains nécessitent l'installation d'une zone "technique" dans laquelle on peut entretenir et réparer les véhicules. C'est dans une zone déserte de Nouméa et en retrait de la côte, que l'on construit des demi-lunes servant d'ateliers ainsi que des zones de stockage du carburant. On peut y accueillir jusqu'à 1 000 véhicules. Le site prend alors le nom de Motor Pool. Photographie aérienne de 1954.
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Rond-Point de l'Ancre de marine
Installée en 1953, avant même que cet espace ne soit un rond-point, l'ancre de marine est un symbole de la présence américaine à Nouméa. Elle est directement issue d'un croiseur de l'US Navy stationné sur le Caillou. D'autres hélices offertes par le musée maritime de la ville agrémentent désormais la promenade qui longe la baie de l'Orphelinat.
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Stèles commémoratives
Plusieurs monuments et stèles sont implantés le long de la baie de l'Orphelinat, à proximité immédiate du rond-point de l'Ancre de marine. Ces monuments sont dédiés aux Forces Françaises Libres et honorent particulièrement le général De Gaulle en rappelant même sa visite aux Calédoniens en 1956. Un hommage lui a de nouveau été rendu en 2020 avec l'inauguration de son buste.
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Croix de Lorraine du Mont Coffyn
Le 18 juin 1973, la croix de Lorraine est érigée au sommet du Mont Coffyn. Un acte hautement symbolique destiné à faire vivre l'esprit des forces françaises libres de Nouvelle-Calédonie. Plusieurs slogans ornent les bases du monument près des plaques sur lesquelles sont gravés les noms des Calédoniens s'étant engagés auprès de De Gaulle, entre 1940 et 1943. Tous les 19 septembre se tient une cérémonie de commémoration (ralliement de la NC à la France Libre).
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Monument américain
C'est le monument qui permet au peuple calédonien de rendre hommage à l'engagement américain sur notre archipel. Inauguré en 1992, il commémore alors les 50 ans de l'arrivée des 18 000 premiers soldats (GI's) à Nouméa, le 12 mars 1942. Régulièrement, des commémorations et des manifestations ont lieu en référence aux Etats-Unis (20 ans des attaques du 11 septembre 2001 par exemple).
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Musée de la 2GM en NC
Un musée installé dans une demi-lune américaine !
La date de son inauguration ne doit rien au hasard. Le 19 septembre 2013 commémore en effet la date anniversaire du ralliement de la Nouvelle-Calédonie à la France Libre du général De Gaulle. Magnifique musée, il est l'un des lieux de référence pour comprendre ce qu'a été le conflit mondial en particulier dans le Pacifique.
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Place Bir Hakeim
Le monument aux morts de la ville de Nouméa a été inauguré en 1924.
En 1940, la place est le théâtre d'un épisode du ralliement à venir de la Nouvelle-Calédonie à la France Libre. En effet, des Calédoniens viennent soutenir la France de De Gaulle. Ce sont les "Mousquetaires".
Histoire et mémoires
Chaque binôme présente la relation entre histoire et mémoires à partir de l'un des sites visités (lieu, monument ou objet vu au musée de la Seconde Guerre mondiale de Nouméa).
Ce dernier temps de l'étude, principalement réalisé en salle de classe et en salle multimédia, a permis d'effectuer quelques recherches complémentaires. Un temps de travail indispensable pour cerner ce qui constitue notre mémoire collective calédonienne sur cette période particulière. Si collectivement, le souvenir positif de l'adhésion à la France Libre et les bienfaits de la présence américaine de 1942 à 1946 sont communément admis, il est intéressant de se pencher sur le lien étroit qu'entretiennent l'Histoire et la mémoire ou plutôt les mémoires. Alors que l’Histoire peut être définie comme l'étude des traces du passé, nécessaire à la création d'un récit d'évènements fondés sur des documents de nature variée le plus souvent conservés dans les archives, la mémoire, elle, repose sur des souvenirs. Ceux-ci peuvent être individuels (ceux des témoins, des contemporains, des descendants) ou collectifs (groupes porteurs de mémoire, défendant une cause, un parti politique, etc.). Vivantes et mouvantes, soumises aux aléas du temps et de l'idéologie, ces mémoires participent à la construction d'une mémoire subjective.
Dans la construction du roman national et du roman calédonien, il est certain que les lieux de mémoire qui ont été réalisés depuis la guerre favorisent le devoir de mémoire de la population en forgeant unité et identité communes. Une mémoire qui se transmet sans cesse.
Un outil de transmission de la mémoire : le musée de la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie
La Seconde Guerre mondiale a marqué durablement l'histoire de la Nouvelle-Calédonie, particulièrement sur la période 1940-1945. Encore visibles de nos jours, notre archipel du bout du monde conserve certaines traces de ce passé.
Du fait de sa position géographique, le pays devient en 1942 une base arrière stratégique de la guerre du Pacifique pour les forces alliées afin d’arrêter l’expansion nippone. En s'installant ici pendant plusieurs années, les Américains ont laissé nombre de traces. Le musée nous le rappelle.
Le musée de la Seconde Guerre mondiale voit le jour à une date très symbolique, le 19 septembre 2013, célébrant ainsi les 73 ans du ralliement de la NC aux Forces Françaises libres. Son objectif : transmettre la mémoire de cette période, informer les jeunes sur ce qu'il s’est produit dans le passé, ce pour quoi leurs ancêtres se sont battus. Situé 14 avenue Paul-Doumer, au centre-ville, le musée est installé dans une demi-lune construite en 1943 par l’armée américaine qui l’utilisait pour y stocker son matériel.
Le musée reflète cette vision paradoxale, d’une guerre plutôt « positive » pour le Caillou malgré les difficultés et traumatismes subis par la population contrairement à la majorité des pays où cette guerre est davantage synonyme d’horreurs et de destructions. En effet, la NC n’a subi ni dégâts matériels ni victimes sur son sol.
Dans le musée de la Seconde Guerre mondiale, nous pouvons retrouver certains objets utilisés durant la période de guerre et particulièrement ceux apportés par les Américains voire même les Australiens et les Néo-Zélandais (on rappelle que plus d'un million de soldats américains sont passés par la Nouvelle-Calédonie entre 1942 et 1946). Coca-cola, chewing-gum, canettes métalliques font alors leur apparition… De plus, les soldats américains (GI's) fabriquent de nombreuses infrastructures tels que des aérodromes, des cinémas, des hôpitaux… favorisant une expansion économique et une ouverture culturelle. Les Américains ont ainsi apporté de nombreux progrès et apporté un vent de modernité et de folie à cette île. La période de l’installation des forces alliées a généré d’importants bouleversements tant dans la vie quotidienne que dans les mentalités des Calédoniens engendrant une formidable évolution sociale et politique. La présence américaine et celle des troupes de l’ANZAC (troupes armées australiennes et néo-zélandaises) sont profondément ancrées dans la mémoire collective de la NC.
De nombreuses bornes scientifiques, ludiques et interactives sur les avancées durant cette période comme le nucléaire, les radars, mais aussi sur les espèces invasives sont présentes. De plus, le casque virtuel permet aux visiteurs de se mettre dans la peau des soldats et ainsi de vivre ce qu’ils ont vécu.
Le musée de la Seconde Guerre mondiale à Nouméa permet donc d’alimenter ce Devoir de Mémoire qui oblige moralement les individus à se souvenir de cet événement historique et de ses victimes, afin qu'un événement de ce type ne se reproduise pas. En effet, il est important de connaître l’histoire de son pays et de la transmettre de génération en génération : c’est ce que recherche les responsables politiques, particulièrement avec la création d'un tel musée. Et si l'Histoire est bien une science qui étudie le passé, il est important de rappeler que des outils tels que ce musée permettent de transmettre la mémoire des événements les plus marquants et dont nous devons collectivement nous souvenir.
Les cinémas américains
Le 12 mars 1942, et pendant plus de 4 ans, la présence américaine va affecter l’ancienne époque. Dès le premier jour, ce sont 18 000 Américains qui débarquent en Nouvelle-Calédonie, sous le commandement du général Alexander Patch. Ils s’installent dans différents camps et construisent progressivement des lieux de spectacle, notamment des cinémas.
Le cinéma n'est pas inconnu à Nouméa : des débuts en 1897 jusqu'au début de la guerre, la salle obscure attire. Et même si au début les premières projections restent coûteuses et peu rentables, le cinéma trouve son public, d'abord à l'Hôtel de Ville puis ensuite avec le Grand Cinéma Calédonien, qui devient le « Cinéma Hickson ».
Avec l'arrivée des GI's en 1942, le monde du cinéma nouméen connaît une transformation sans précédent. Partout dans Nouméa, les Américains ouvrent des salles et des espaces cinématographiques de plein air, fréquentés par les militaires et les civils. Pendant cette période, ce sont onze salles de cinéma qui sont construites dont sept projettent les derniers films tournés aux Etats-Unis. Au total, vingt-quatre cinémas proposent des programmes assez différents, en français ou en anglais afin de satisfaire tout le monde. Mais en ces temps de guerre, les approvisionnements en films français restent très limités, si bien que pendant 5 ans, les mêmes films passent et repassent.
Au départ des Américains, en 1946, quelques personnalités locales se lancent dans le cinéma en récupérant ou en achetant le matériel américain et les projections ont alors lieu dans les demi-lunes ou en plein air.
A leur manière, les cinémas de l'époque américaine (en particulier celui de Pont-des-Français) permettent donc d’entretenir le devoir de Mémoire car ils représentent un lieu de mémoire collective, leur fonction étant de transmettre les souvenirs aux contemporains et aux générations futures. Le cinéma constitue un passage de formes individuelles de la mémoire et de l’identité des formes collectives. En Nouvelle-Calédonie, les cinémas permettent donc de conserver le souvenir du passage des Américains.
Les aérodromes
Alors qu’en 1869 la plage de Magenta est appelée « Vallée des Noyers », des réunions hippiques se déroulent dans la plaine de Magenta un an plus tard, d’autant plus qu’un hippodrome y a été aménagé.
Et si en 1931 la plage de Magenta permet à un biplan d’effectuer un premier vol, il faut en réalité attendre 1942 pour que les Américains y construisent une piste d’aviation et des hangars. En effet, alors que les GI’s sont tout juste arrivés (12 mars 1942), il devient indispensable de créer des infrastructures pour installer la base militaire avancée et se préparer à la Guerre du Pacifique. C’est ainsi que 9 aérodromes sont construits, dont 4 sont toujours opérationnels (Tontouta, Magenta, Koumac, Iles des Pins). Ceux de la plaine des Gaïacs, Oua-Tom, Dumbéa, Nouville et Thio, également construits par les Américains, ne sont plus opérationnels.
Au lendemain de la guerre, les installations de Magenta sont réaménagées pour permettre de créer un aérodrome dont la fonction est de desservir les lignes intérieures de la Nouvelle-Calédonie.
La Place Bir-Hakeim
La place Bir-Hakeim est une place de commémoration pour les soldats Néo-Calédoniens et des Nouvelles-Hébrides et qui doit son nom à la bataille de Bir-Hakeim, dans laquelle les FFL (Forces Françaises Libres) ont combattu vaillamment dans le désert libyen. Cette bataille est connue en Nouvelle-Calédonie pour avoir été celle dans laquelle le Bataillon Mixte du Pacifique a le plus excellé.
La Bataille de Bir-Hakeim a eu lieu non loin d’un point d’eau désaffecté (d’où la bataille tire son nom) du 27 mai au 11 juin 1942. Elle est la première contribution militaire majeure des FFL et, ce qui est d’autant plus impressionnant, est que parmi les 3 723 hommes qui ont combattu, une partie faisait partie du Bataillon Mixte du Pacifique. Cette bataille, d’une importance stratégique décisive pour les Alliés, permet de donner un temps de répit aux troupes britanniques qui, par la suite, remportent la bataille d’El-Alamein (juillet 1942).
Mais la place est surtout connue pour son monument aux morts. Tout d’abord situé au croisement de la rue Sébastopol et du boulevard Cassini et inauguré le 2 novembre 1924, il est déplacé sur la place Bir-Hakeim en commémoration des morts du bataillon mixte du Pacifique.
Ce monument possède quatre plaques commémoratives :
- la façade Ouest (direction du regard du Poilu) possède des gravures alliant les noms de famille usuels des soldats disparus ; on y trouve également une plaque dénombrant le nombre de kanak morts pour la France, délimité par aires coutumières
- la façade Sud comporte une gravure sur bronze représentant un navire emportant les soldats et sur le quai les représentants de la société civile qui saluent le départ des mobilisés
- sur la façade Nord on peut observer des scènes d’horreur dans les tranchées, avec des soldats en pleine action, avec fusils et grenades.
- sur la façade Est, il est représenté une jeune femme qui tient dans sa main droite des roses, et dans la gauche une palme de laurier. Elle représente la Nation.
De nos jours, en plus de sa valeur commémorative, cette place sert aux défilés militaires (notamment pour le 8 mai et le 14 juillet).
Les lieux de culte
Les Américains forment une population considérée comme très croyante. Lors de la Seconde Guerre mondiale, les GI’s ont alors cherché, partout où ils se sont installés, à renouer avec leur culte. En effet, la guerre et son lot de morts tendent à rapprocher les hommes de leurs croyances si bien que l’armée a systématiquement prévu des lieux de culte, intégrant des ministres du culte représentant les différentes communautés religieuses (principalement des rabbins, prêtres ou pasteurs). Dans les endroits où il existe un lieu de culte local, les troupes participent aux cérémonies religieuses avec la population. Dans les endroits plus reculés, les demi-lunes servent alors de synagogue, de temple ou d’église. C’est ce qu’il s’est passé à Nouméa, par exemple avec la demi-lune n°109 aménagée en chapelle. Surtout, à l’arrière du Pentagone, une église provisoire de plan basilical avec deux ailes perpendiculaires à la nef est construite entre 1943 et 1944. Bien que désaffectée après le départ des Américains, les Nouméens en ont conservé le souvenir puisqu’elle est longtemps restée visible dans le paysage de la ville jusqu’à ce qu’un incendie la détruise.
Mais le lieu de culte le plus emblématique de la période intervient après le départ américain avec la construction de l’église du Vœu, au Receiving. Faisant suite à la promesse de Mgr Bresson de construire une église si les Japonais n’envahissaient pas la Nouvelle-Calédonie lors de la guerre du Pacifique, des quêtes, des kermesses et une grande souscription sont organisées, en 1947, pour recueillir des fonds. La municipalité cède un terrain en face du vélodrome pour édifier l’église. En septembre 1951, pour remercier Nouméa des aides nombreuses dont elle avait bénéficié, Haguenau, ville martyre de la Seconde Guerre mondiale devenue la filleule de la Nouvelle-Calédonie, offre un vitrail de Sainte-Odile, patronne de l’Alsace. L’église est inaugurée le 14 mai 1953 et officiellement consacrée sous le nom d’« Église du Cœur immaculé de Marie ». Les personnalités civiles, militaires et religieuses y assistaient ainsi qu’une foule estimée à 2 000 personnes.
D’autres lieux de culte se développent après-guerre, en lien direct avec le passage des Américains. Pour qui veut construire rapidement un édifice à moindre coût, les demi-lunes représentent une solution idéale. Ainsi, sur le modèle de ce que faisaient les GI’s, plusieurs lieux de culte ouvrent : à Koumac (église « Sainte-Jeanne d’Arc » en 1946), Ouégoa ou encore à Montravel. Une façon indirecte, finalement, de transmettre la mémoire de la présence américaine.
Les demi-lunes
La demi-lune est une invention britannique développée par les Américains et introduite en Nouvelle-Calédonie durant la Seconde Guerre mondiale. Appelée Quonset Hut, les Calédoniens la surnomment « demi-lune » en raison de sa forme semi-circulaire.
Les demi-lunes sont des docks en tôle ondulée. Et, malgré quelques défauts, la forme cylindrique permet plusieurs avantages. Facile à assembler et à entretenir, ses parois sont arrondies donnant une faible prise au vent, permettant de résister aux caprices du climat tropical mais aussi capable de faire rebondir des éclats d’obus ou de s’en protéger.
À Nouméa, le quartier du Receiving compte pendant la guerre 150 demi-lunes pouvant loger jusqu’à 500 officiers et 3 000 soldats. Au centre-ville, une demi-lune servait de chapelle durant la guerre. Sur l'île Nou, sur l'actuel site de l'Université de la Nouvelle-Calédonie, un village de demi-lunes a été monté afin d'héberger les soldats. Pas moins de 46 demi-lunes y sont installées, pour des usages divers : cuisine, soins, cinéma, salle de loisirs, chapelle.
Après la guerre, les demi-lunes sont pour la plupart démontées ou gagnées par l’usure du temps. Cependant, certaines sont conservées, entretenues et réutilisées à des fins diverses. Certaines, exploitées par les Forces Armées de la Nouvelle-Calédonie (FANC), gardent ainsi leurs fonctions militaires ; d’autres servent de lieux de culte (demi-lune de l'église de la communauté vanuataise de Montravel dans les années 1980). Deux autres demi-lunes se sont transformées en école. Le garage Aram à l'entrée de Ouémo a ouvert en 1956 dans une demi-lune. Certaines demi-lunes sont devenues des habitations, plusieurs d'entre elles ont servi de salles de spectacle, de dancing ou de loisirs. D’autres ont servi d’infrastructures agricoles. A Ouégoa, une demi-lune est transformée dès 1948 en salle des fêtes. Et l'une des plus importantes en taille (34 mètres de long par 12,85 mètres de large) et des mieux conservées, située en face de l'hôpital Gaston-Bourret au centre-ville, a été cédée par les FANC à la ville de Nouméa en 2002 et réaménagée pour accueillir le musée de la Seconde Guerre mondiale inauguré en 2013 (cf. image ci-contre).
Et parmi les constructions plus récentes, on observe que certains architectes ont conservé le souvenir de la demi-lune pour trouver leur inspiration et construire, par exemple, la salle omnisports municipale François-Anewy inaugurée en 2011 à la Vallée du Tir.
Pour en savoir plus : https://www.noumea.nc/sites/default/files/architecture_en_conserve_brochure.pdf
Style de vie et objets américains
Le 12 mars 1942, la Nouvelle-Calédonie voit débarquer la Poppy Force composée de 17 000 américains. Le territoire devient alors une des principales bases militaires alliées, dans le but de faire face aux Japon. Cette présence militaire étatsunienne a marqué jusqu’à aujourd’hui le mode de vie des Calédoniens.
Ce sont en effet les Américains qui ont importé des produits tel que les chewing-gums ou les cigarettes. Durant la guerre, l’armée en distribue à ses GI’s qui les redistribuent à leur tour, ou les échangent, avec la population. Ils importent aussi le whisky, le rhum et le Coca-Cola, qu’ils consomment souvent en écoutant du jazz lors de bals où sont invitées des Calédoniennes. Déjà à cette époque naît un marché noir de l’alcool. Certains stockent de la bière pour la revendre plus chère lors des pénuries temporaires. L’armée de l’oncle Sam importe également les milk-shakes, les glaces et un système de réfrigération. Enfin, avant leur départ, certains soldats laissent des vêtements, des véhicules (jeep) ou des fusils pour la chasse à des Calédoniens avec qui ils ont noué des liens d’amitié.
Bien que courte, la présence américaine a laissé une trace encore perceptible aujourd’hui au sein d’une population dont le mode de vie local est en partie inspiré de cette période si particulière. Ces aspects renforcent la mémoire de ce temps-là. Les Anciens s'en souviennent toujours avec émotion et la scénographie du musée de la Seconde Guerre mondiale les met à l'honneur. Ces objets sont ainsi des éléments qui participent à la construction de notre mémoire collective concernant la présence américaine sur le Caillou. Ils véhiculent l'idée de ce que certains considèrent comme ayant été une "belle époque".
Le personnage de De Gaulle et ses monuments
Charles De Gaulle, né le 22 novembre 1890 à Lille et mort le 9 novembre 1970 à Colombey-les-Deux-Eglises (à 79 ans) est l’un des hommes qui a eu un rôle majeur au sein de la France dans la Seconde Guerre mondiale. Installé à Londres dès le 10 juin 1940, il appelle les Français à se rebeller contre la politique prônée par Pétain et leur propose de rejoindre la France libre à travers la BBC (Appel du 18 Juin 1940). Suite à cet appel, de nombreux français rejoignent la France libre et le Général De Gaulle, et donc la résistance. C’est le choix que fait la Nouvelle-Calédonie le 19 septembre 1940.
L’histoire de notre territoire est ainsi directement liée à cet homme.
Ça le sera encore davantage avec la visite du Général en 1956, avant que celui-ci ne devienne président de la République (de 1958 à 1969).
C’est donc à travers monuments, stèles, représentations de la Croix de Lorraine et un buste, que le personnage de De Gaulle est célébré sur notre territoire et en particulier à Nouméa. En effet, au rond-point de l’Ancre de marine, en baie de l’orphelinat, plusieurs représentations rendent hommage à ce personnage et à son action. Unanimement considéré comme un militaire et un homme politique d’envergure, il est toujours dans les mémoires des habitants de l’archipel. Son souvenir se perpétue, de génération en génération, à tel point qu’en 2020 une statue lui a été consacrée pour commémorer le 80ème anniversaire du ralliement de la Nouvelle-Calédonie à la France Libre. Trônant tout près des stèles exposées sur la promenade, c’est désormais devant cette figure incarnée que se tiennent les célébrations relatives à la France Libre, et à la « Calédonie Libre ». Il est donc un élément de mémoire supplémentaire puisqu’il représente un moment important de l’histoire de la Nouvelle-Calédonie et de la France Libre.
En guise de synthèse
De nombreux monuments commémorant la Seconde Guerre mondiale jalonnent la ville de Nouméa. De nombreuses ressources sont disponibles et traitent de cette question. Des revues, des livres, des articles nous expliquent ce qu'a été la période ; les informations disponibles au CDI du lycée et les exemples donnés en classe nous aident aussi.
Mais surtout, notre sortie et le travail réalisé ensuite nous ont permis de mieux cerner cette histoire et de relier celle-ci aux mémoires. On a ainsi pu comprendre l'intérêt d'avoir des monuments ou des musées. Ce n'est pas juste pour rappeler le passé mais c'est aussi pour mieux saisir le rôle des acteurs-clés de cette période à travers leur choix d'ériger des monuments, de commémorer des événements et des personnages importants. C'est donc aussi l'étude de ce qu'ont décidé de faire, à certaines moments, des institutions ou des associations. D'autre part, il ne faut pas oublier qu'à Nouméa la fréquentation touristique est aussi un moyen de transmettre la mémoire de cette période. Enfin, les commémorations organisées lors de célébrations mémorielles (8 mai, 18 juin...) permettent de réactiver les sentiments individuels et collectifs autour de cette histoire-là. Ces monuments, ces cérémonies permettent ainsi à chacun de contribuer au devoir de mémoire, un aspect fondamental pour la société calédonienne puisque cela partie de son identité.
Pour prolonger
Mémoire des sites américains : que reste-t-il dans le paysage nouméen ?
Balayages de photographies
à gauche : 2020/à droite : 1976
Le Pentagone est une construction en bois installée par les Américains dès 1943. Elle tient lieu de Quartier Général. En 1947, elle est cédée à la France qui l'utilise alors pour en faire le siège de la toute nouvelle Communauté du Pacifique Sud (CPS) (installation en 1949) et qui y reste jusqu'en 1995. L'état de délabrement de la structure l'impose et le projet immobilier de la ville de Nouméa permet l'implantation, après démolition, d'une zone dédiée au tourisme.
Les demi-lunes visibles dans le quartier du Receiving en 1954.
Une partie du Receiving aujourd'hui
L'aérodrome de Magenta, 1943
L'aérodrome de Magenta, 1954
Magenta, aujourd'hui