Albert Ier de Monaco
Récit d'un prince aux multiples facettes
Le Prince Albert Ier de Monaco, est un des plus grands explorateurs de la fin du XIX ème et du début du XX ème siècles. Très tôt, cette personnalité "touche à tout" a réalisé ses passions tout en les faisant partager, son charisme faisant l'unanimité de tous... et cet explorateur est devenu Prince souverain.
Les débuts du Prince
Voyageant dès sa jeunesse avec ses parents, le Prince Charles III et la Princesse Antoinette-Ghislaine, il a pris goût aux déplacements à travers le monde, découvrant ainsi de nouvelles cultures avec leurs langues.
La découverte de la biologie, à l'instar de sa passion pour les voyages, survient au cours de sa jeunesse, notamment en parcourant les jardins et les alentours du château de Marchais, en région picarde. Le pourtour du château est parsemé d'étangs et de surfaces boisées, l'invitant à découvrir une faune et une flore variées.
A partir de sa dix-septième année, il étudie l'océanographie de l'époque de manière approfondie, en entrant dans la marine impériale française, puis en intégrant la marine espagnole, suite à l'invitation de la reine Isabelle II.
Albert I er , le "prince explorateur"
La jeunesse du Prince Albert définit donc parfaitement sa célèbre carrière d'explorateur scientifique. En plus des formations suivies auprès des marines française puis espagnole, l'intérêt qu'il nourrit pour l'océanographie, et la mer est certainement renforcé par les sorties qu'il effectue avec les pêcheurs et marins monégasques, ainsi que les nombreuses lectures d'articles et nouvelles scientifiques relatant les expéditions polaires et plusieurs voyages.
Fascicule LXXVI : Copépodes parasites de poissons et d'annélides provenant des campagnes scientifiques de S.A.S. le Prince Albert Ier de Monaco (1929)
Publication des résultats...
Nous avons pu retracer les explorations du Prince Albert Ier, et de son équipage, ainsi que les navires ayant effectué ces campagnes, principalement grâce au document intitulé Résultats des campagnes scientifiques accomplies sur son yacht par Albert Iᵉʳ, Prince Souverain de Monaco. Ce présent document comporte 110 fascicules scientifiques, présentant chacun les observations sur un ou plusieurs groupe(s) de coraux, crustacés, éponges, mammifères marins, mollusques, plancton, ou bien encore poissons. Tous ces documents ont été imprimés à l'imprimerie de Monaco, même au-delà de sa mort, comme par exemple, ci-contre, la première page du fascicule LXXVI.
L'auteur principal est son altesse le Prince lui-même, publié par le baron Jules de Guerne, puis par Monsieur Jules Richard. À cela, s'ajoutent près de 28 co-auteurs, la plupart étant des scientifiques de multiple domaines, ou bien encore, des artistes.
Les copépodes sont une sous-classe de petits crustacés.
Les collections du Muséum réunies par Alphonse Milne-Edwards sont exposées dans une salle que le Prince visite en 1884. Toutes ses pensées se dirigent alors vers les recherches "thalassographiques", comme il l'a écrit. Alors âgé de 25 ans, il décide d'assumer ses responsabilités en tant que capitaine de bord. Il achète son premier yacht, suivi par trois autres, présentés ci-dessous avec l'évolution de son équipage
Les navires et équipages d'exploration du Prince Albert I er
Le Prince prépare lui-même ses expéditions pendant l'hiver et le printemps, planifiant les itinéraires, les ports où faire escale, ou bien encore, testant les nouveaux outils et machines. Il prend le large pendant la période estivale, la plus favorable notamment pour les campagnes par-delà le cercle polaire.
Les trajets de quelques explorations par le Prince Albert I er , reconstitué sous une forme cartographique.
Des explorations marquantes du Prince Albert I er de Monaco
La conclusion de ses campagnes
C'est donc, à bord de ces quatre navires, que le Prince Albert I er a dirigé au total, vingt-huit campagnes océanographiques. Ces dernières ont été entreprises entre 1885 et 1915, date à laquelle il met à terme définitivement à ses explorations, suite aux affrontements engendrés par la Première Guerre Mondiale, qu'il avait tant cherché à éviter.
Durant ces expéditions, 3698 stations océanographiques ont été mise en place sous le contrôle direct du Prince. Chaque station met en œuvre un sondeur pour relever la profondeur marine, un thermomètre et un appareil de récolte pour remonter des échantillons (filet, drague, chalut, nasse, palangre, trémail ou une barre à fauberts).
Les animaux récoltés, sont classés par groupes zoologiques. Ils sont confiés pour leurs compétences aux différents scientifiques qui accompagnent le Prince.
Plusieurs planches, illustrant les animaux recueillis durant les diverses campagnes.
Les campagnes scientifiques du Prince Albert Ier ont permis de nombreux progrès dans deux domaines...
L'océanographie...
Soucieux de la fiabilité des données, et passionné par les avancées technologiques, le Prince fait équiper ses navires d'outils océanographiques innovants.
Au cours de ses campagnes, il invente ou améliore certaines méthodes et instruments, comme, par exemple, le filet à gouvernail, la machine à sonder, le chalut de surface, etc... Tant d'avancées technologiques qui ont permis l'essor des recherches océanographiques.
et la cartographie !
Le Prince a été largement salué pour sa Carte générale bathymétrique des océans, réalisée avec le professeur Julien Thoulet, quatre ans après le Congrès international de géographie de Berlin (1899).
Durant ses expéditions, Albert I er de Monaco a également réalisé de nombreuses cartes, notamment les itinéraires des quatre campagnes océanographiques de l'Hirondelle ainsi que la carte des déplacements des masses d'eau en Atlantique tempéré. Sa carte du système général des courants de l'Atlantique Nord lui a valu un Prix de la Société de Géographie en 1888 à laquelle il a adhéré de 1886 jusqu'à la fin de sa vie. Il recevra par ailleurs, en 1921, à New York, la médaille Cullum de la Société américaine de géographie.
Il a contribué aussi à la connaissance de l'archipel du Svalbard avec des cartes hydrologique et topographique de l'île du Spitzberg.
Prince savant
Le Prince Albert I er de Monaco dans son laboratoire.
L'anthropologie, un autre centre d'intérêt du Prince…
En parallèle de sa passion pour l'océanographie, le Prince Albert s'est intéressé aussi à l'anthropologie, à tout ce qui concerne l'origine de la vie, l'évolution des espèces, ou bien encore, la sélection naturelle. Le Prince a lancé d'ailleurs des fouilles dans plusieurs grottes dont celle de Grimaldi. Le Musée d'anthropologie préhistorique de Monaco a ouvert ses portes en 1902, à la suite des explorations et des études scientifiques consacrées aux grottes de Baoussé-Roussé, près de la frontière franco-italienne.
"conserver les vestiges d'humanités primitives du sol de la Principauté et des régions avoisinantes."
Cette citation du Prince fait directement référence à sa volonté de promouvoir davantage cette thématique. Du reste, il a fondé en 1910 à Paris, l'Institut de paléontologie humaine, le bâtiment l'accueillant est construit dix ans plus tard, en 1920.
De gauche à droite, le musée d'anthropologie préhistorique de Monaco (1902), et l'institut de paléontologie de Paris (1920).
Sensibiliser le public à travers les événements internationaux…
Le Prince, suite à ses campagnes, souhaite faire partager ses découvertes à la communauté scientifique, et à la société en général. Pacifiste, de nature altruiste, il tient à contribuer à l'avancée des connaissances, à améliorer la compréhension du milieu marin, de sa faune et de sa flore. C'est ainsi, qu'il participe activement à plusieurs expositions et donne de nombreuses conférences dans différentes instances de part le monde, comme le montre la carte suivante :
Diffuser le fruit de ses découvertes à l'international.
Création du Musée océanographique de Monaco
Musée océanographique, Monaco, 1860-1910. Photographie de Gilleta, J. (Site de Gallica )
Le Prince décide la construction d'un musée océanographique à Monaco. La première pierre est posée en 1898, et il l'inaugure en 1910.
Prince souverain
Bien qu'étant présent sur la scène internationale, le Prince Albert est très actif à Monaco, en témoignent les nombreux travaux et infrastructures ayant vu le jour durant son règne. Il souhaite poursuivre le souhait de son père, en faisant de Monaco un lieu de loisirs afin d'attirer une riche clientèle.
Avant même de devenir souverain suite au décès de son père Charles III, survenu le 10 septembre 1889, il est actif sur le sol de la Principauté. Il est notamment connu pour avoir, à l'âge de 10 ans, posé la première pierre du casino des Spélugues, aujourd'hui, le casino de Monte-Carlo.
Mais c'est en tant que Prince souverain que son altesse sérénissime, le Prince Albert Ier, participe le plus à la modernisation et au rayonnement de Monaco à l'international, comme le démontre ses principales contributions :
Les itinéraires du Rallye de Monte-Carlo de 1911.
Soucieux de la paix dans le monde
Le Prince est un défenseur opiniâtre de la paix, souhaitant régler les conflits par la voix diplomatique. Il accueille par ailleurs le onzième Congrès universel de la paix en 1902, avant de créer l'Institut international de la Paix à Monaco, un an plus tard en 1903.
Son éternel optimisme est vaincu par la survenue d'une guerre qu'il a voulu empêcher : il arrête alors ses explorations. Il décède le 26 Juin 1922 à Paris.