A la découverte du quartier de l'ancien Palais de Justice

Ce parcours est composé de 6 étapes (environ 1,1 km). Départ au niveau de la place Aristide Briand.

Dans la seconde moitié du 19e siècle, le quartier de l'ancien Palais de Justice, autour de la place Aristide Briand, forme une véritable cité judiciaire rassemblant à la fois un palais de justice, une prison et une gendarmerie. Ce quartier a évolué dans ses fonctions au fil des années, tout en gardant son architecture de style néoclassique. Ce parcours, enrichi d’iconographies « avant/après », rend compte de la métamorphose de ce quartier, des années 1900 jusqu'à nos jours. En tant qu'étudiantes de l'ESPI (école spécialisée dans les professions immobilières), amatrices d’édifices anciens et particulièrement de style néoclassique, il nous a paru évident de faire un lien entre nos études dans l'immobilier, notre goût pour l'architecture et l’Histoire. Ce projet d’étude a donc pris la forme d'un parcours sur Nantes Patrimonia, qui nous a permis de découvrir une partie de notre patrimoine et de le partager avec les habitants de Nantes.

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L’ancien Palais de Justice

Le projet de reconstruction du Palais de Justice remonte à 1840, lorsque le Conseil général décide de remplacer celui du Bouffay et en confie la réalisation à Ch Farrouilh. Mais le décès de ce dernier en 1843 amène à des évolutions majeures : les architectes retenus, S.- F. Seheult et J.-Fl. Chenantais, sont invités à rassembler palais, prison et gendarmerie dans un nouveau lieu au nord-ouest de la ville. La construction d'un complexe judiciaire est déclarée d'utilité publique par une ordonnance royale de 1845. Le chantier du palais de Justice prend fin en 1851. Cet édifice, situé dans l’axe de la rue La Fayette structure la place. Il s’affirme par sa monumentalité et ses références à l’Antiquité romaine, avec notamment son portique d’entrée, traité en arc de triomphe sur deux niveaux, orné de part et d’autre de deux allégories, La Loi et La Force par A. Ménard, et surmonté du groupe sculpté La Justice protégeant l’Innocence contre le Crime par E. Suc. À la fin des années 1980, le Palais de Justice est jugé inadapté. En effet, celui-ci n'est pas assez fonctionnel et moderne car il ne répond pas aux exigences liées à l'accroissement du nombre d'affaires traitées. Les autorités décident alors d'en construire un nouveau, qui voit le jour en 2000 sur l'île de Nantes. Aujourd'hui, un hôtel de luxe a pris place dans l'ancien Palais de Justice, totalement rénové et modernisé. Le restaurant de cet hôtel s'est installé dans l'ancienne cours d'assise et porte le nom « L'Assise ».

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La caserne de gendarmerie et la maison d'arrêt

Au début du 19e siècle, à l’emplacement de la place La Fayette (actuelle place Aristide Briand), se trouvait une ancienne enclave maraîchère dont le terrain jouxtait la maison d’arrêt bâtie en 1830. Cette prison est rapidement jugée insalubre et inadaptée aux nouvelles normes de l’enfermement cellulaire. Dans le cadre du nouveau projet de cité judiciaire voulu par le Conseil général, la maison d’arrêt est reconstruite entre 1865 et 1869 par l’architecte J.-F. Chenantais. Ce dernier dessine également les plans et élévations de la gendarmerie réalisée en 1869, Sa façade servira de modèle aux constructeurs de l’îlot qui lui faisait face. Le bâtiment se compose de quatre travées de trois niveaux de part et d’autre et d’un avant-corps central. Cette ancienne caserne de gendarmerie abrite depuis 2015, des logements, un spa, un centre de chirurgie et médecine esthétique et des commerces. Quant à la maison d'arrêt, elle a été désaffectée en 2012, puis détruite pour laisser place à un programme immobilier comprenant 158 logements, une crèche et un parking. De la prison, il ne reste que le porche d’entrée et un bâtiment du greffe qui ont été intégrés au projet.

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Le lycée Jules Verne

Par sa monumentalité et son emprise, le lycée Jules Verne qui occupe le côté sud de la rue du Général Meusnier, constitue un repère urbain du quartier. Construit en 1880 par l’architecte Van Iseghem, en tant qu’annexe du « Grand lycée » (l’actuel lycée Clemenceau), il prend le nom de « Petit lycée ». Devenu un établissement à part entière, il est dénommé lycée Jules Verne en 1955. Agrandi à plusieurs reprises, il conserve sa façade sur rue d’origine, marquée par son traitement à bossages en table continue, traitement peu répandu à Nantes. Précédée d’un emmarchement, surmontée de deux impostes et en partie haute d’un fronton triangulaire orné de l’horloge, l’entrée se veut monumentale. La façade symétrique qui se déroule sur plus 65 mètres, renvoie aux sources d’inspiration néoclassique.

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La rue La Fayette et ses commerces

L'urbanisation de la rue La Fayette s'est amorcée dans les années 1830-1840. C'était une rue cossue, bordée de commerces de standing et de banques... un passage quasi obligé pour faire ses emplettes ! En 1910, l'enseigne commerciale « À Réaumur », spécialiste du prêt à porter de qualité, fondée en 1897 à Paris par l'industriel Jean-Baptiste Gobert-Martin, implante une succursale au numéro 10 de la rue Lafayette. En 1957, quatre ans avant la fermeture de la chaîne de magasins, l'immeuble est vendu aux « Grands magasins Georges Braun et Cie ». Puis, la Ville de Nantes en fait l'acquisition en 1960 et y installe un gymnase, nommé « Armand-Coidelle », siège du club de gymnastique « La Nantaise ». La rue a conservé ses banques historiques : la BNP Paribas, au numéro 8, a investi l’ancien hôtel de la Brosse conçu entre 1800 et 1816 par les architectes S.-F. Seheult et E. Blon ; la succursale de la Banque de France, au numéro 14, occupe un immeuble réalisé par l'architecte nantais Jules Montfort, deuxième Grand Prix de Rome en 1868, est l'un des rares bâtiments du centre-ville à survivre aux bombardements de la Seconde Guerre mondiale. Aujourd'hui, cette rue, dénommée rue La Fayette depuis 1830, est restée une artère commerciale.

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La rue du Calvaire avant et après guerre

La rue du Calvaire est actuellement l’une des artères semi-piétonnes les plus commerçantes du centre-ville de Nantes. À l’origine, s’y trouvait le couvent des Filles du Calvaire, à qui la voie doit son nom. Cette congrégation était propriétaire depuis 1625 du chemin qui bordait ses terrains. Les travaux d’aménagement de la rue ont lieu en 1788. Le couvent fut utilisé comme caserne pour la Légion nantaise en 1793 puis fut vendu en 1798. Pendant la Révolution, la rue fut nommée rue Galilée. L’architecte Seheult y construit en 1827 l’hôtel Chardonneau qui abrita successivement le Cercle des beaux-arts, le Grand café du Sport, le grand magasin la Belle jardinière avant d’être détruit en 1891. Cette rue au 19e siècle regroupe des cafés, magasins et par la suite beaucoup d'industriels. Cette voie animée du centre-ville a été l’une des premières à être équipée de lanternes alimentées au gaz en 1852. C’est le 16 et 23 septembre 1943 que les bombardements des alliés s’abattirent sur la ville de Nantes. Cet épisode fut le plus dévastateur et le plus meurtrier que l’agglomération nantaise ait connu. Le bilan fut tragique : 1463 morts, 2500 blessés et des rue dévastées. La rue du Calvaire fut l’une des parties les plus touchées. Ce drame conduisit les autorités de la ville de Nantes à repenser son aménagement, afin notamment de former de nouvelles voies pour s’adapter au trafic grandissant des voitures. C’est le cas de la rue du Calvaire, détruite aux trois-quarts : elle fut élargie pour devenir un « axe de circulation prioritaire », passant de 9 mètres à 25 mètres de large. Ce travail de conception fut effectué par deux architectes, Michel Roux-Spitz et Yves Liberge. Il a fallu tout repenser afin de préserver les quelques immeubles du 19e siècle encore présents et combler le vide laissé par les bâtiments détruits pendant la guerre, avec l’édification de six immeubles en béton typiques de l’architecture des années 1950.

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Boulevard Guist'hau et place Delorme

Situé en centre-ville, le boulevard Guist’hau très emprunté à Nantes, a connu plusieurs transformations. Le « cours du Peuple » fut aménagé en 1790, à l’initiative de Nicolas Delorme, riche bourgeois propriétaire des terrains. Véritable lieu de promenade, il était constitué d'une allée centrale bordée d'ormeaux et limitée par ses maisons et hôtels particuliers. Le cours fut prolongé entre 1844 et 1850 entraînant de nouvelles constructions et les arbres replantés entre 1899 et 1908. Depuis l’entre-deux-guerres, la circulation automobile a modifié son usage, en en faisant un boulevard circulé. En fonction des différents régimes politiques, ce lieu a connu différentes appellations ; la « promenade du boulevard », « boulevard Delorme » … Dans son prolongement, le cours débouche sur une place qui accueillait une monumentale statue de bronze, remplacée après sa disparition pendant la guerre, par un buste de pierre. Elle représente Ange Guépin, ancien médecin, écrivain et politique français qui a joué un rôle important dans la vie politique et sociale de Nantes au 19ᵉ siècle. Cette place a également changé à plusieurs reprises de nom : tout d'abord elle fut baptisée du nom de Mirabeau, puis la Montagne. En 1795, à la demande de Nicolas Delorme, elle prend le nom de son fils Thibault-François Delorme, commissaire tué en mars 1793 lors d’un soulèvement paysan hostile à la République. Le boulevard porte aujourd’hui le nom d’un ancien maire de Nantais, Gabriel Guist’hau, qui a laissé une trace profonde et positive dans la mémoire collective.

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Hôtel « Levesque »

Situé rue Harouys à Nantes, près du boulevard Guist’hau dans un quartier riche en belles demeures, cet hôtel particulier porte le nom de « Levesque », patronyme d’une importante famille nantaise à laquelle il a appartenu. Il fut construit en 1871 pour Joseph Bourgaux par l’architecte nantais Jean-Baptiste Buron, avant d’être acquis par Georges Levesque, petit-fils du maire de Nantes Louis-Hyacinthe Levesque. En 1919, la Ville y installa son conservatoire de « musique et de déclamation ». L’hôtel particulier fut réquisitionné au début de l’année 1944 par la Milice et le 12 août 1944 par le comité départemental de Libération. Après le départ du Conservatoire en 1971, l'hôtel fut le siège d’une maison des associations formant le Centre nantais de Culture Celtique, jusqu'à son transfert au pôle associatif Désiré-Colombe, suivi de la vente du bien par la Ville fin 2015. Construit en granit et tuffeau, cet ancien hôtel particulier est composé d’un bâtiment principal encadré de deux bâtiments annexes. Le bâtiment principal est composé d’un péristyle à balustres soutenu par quatre colonnes corinthiennes formant portique. La façade principale est riche de sculptures, consoles, cartouches, guirlandes, mascarons aux clés des linteaux, pots aux feux, lucarnes à volutes, chaînages et corniches à modillons. L’hôtel appartient désormais au promoteur ADI Logement. Des travaux de réhabilitation et de restauration ont été lancés afin d’y aménager des logements.

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École primaire rue Harouys, ancien lycée de jeunes filles

Créé en 1882, le lycée de jeunes filles, un des premiers en France, fait le pendant du Petit lycée ouvert en 1880 dans le quartier pour les garçons. Il est le fruit de la volonté des républicains alors au pouvoir. Il connaît un succès fulgurant avec 100 élèves dès la première année, puis 200 en 1886. Il accueille en 1907 500 jeunes filles, dans un établissement devenu trop étroit. Après le transfert du lycée à Guist’hau en 1928, les bâtiments sont transformés en une école primaire. La façade monumentale est caractéristique de l’architecture scolaire de la IIIe République. Le blason de la Ville de Nantes apparaît à trois reprises sur la façade principale qui se déroule le long de la rue sur près de 60 mètres. La composition horizontale du bâtiment est soulignée par l'alternance des lits de briques rouges et des pierres calcaires et par la répétition des séries d'ouvertures nombreuses, étroites et serrées à chaque niveau. L'école porte le nom de Guillaume Harouys, maire de Nantes en 1572, qui refusa de se livrer au massacre des protestants au lendemain de la Saint-Barthélémy. Une plaque mentionnant cet épisode est apposée sur la façade.