L’Ile Beaulieu : la naissance d’un nouveau quartier

Le parcours est composé de 12 étapes (environ 3,3 km). Départ au niveau de l'Hôtel de Région.

Quartier en constante mutation, l’Île de Nantes a fait l’objet d’un aménagement profond à partir des années 1960. Alors que les industries occupent la moitié Ouest, la moitié Est a gardé ses vastes prairies, où une première activité économique se développe autour de la ligne de ponts.

Véritable terrain de jeux pour les différents projets qui se sont succédé, cette nouvelle expansion territoriale a permis à l’île Beaulieu de naître comme un quartier inclus dans la ville. Ponctuée de balades urbaines et naturelles, enrichie d’une architecture résolument contemporaine, Beaulieu attend encore la réalisation de nombreux projets.


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Des îles, à une île

Le parc Beaulieu est le dernier témoignage de ce qu’était l’actuelle l’île de Nantes jusqu’au milieu du 19e siècle : un ensemble de prairies à destination agricole, recouvertes d’eau plusieurs mois de l’année.

Ces îles servaient d’ancrage à une ligne de ponts, construite vraisemblablement dès le 11e siècle pour relier les deux rives de la Loire. Au 18e siècle, un comblement progressif des passages d’eau entre les îles est effectué grâce à la construction de digues.

Lors de l’essor industriel de Nantes au siècle suivant, les usines envahissent la grande île de la Prairie-au-Duc située en plein cœur du port maritime, tandis que les îlots de l’Est, à l’instar de l’île Beaulieu et l’île Vertais (comprenant la Prairie d’Amont et la Prairie d’Aval), restent un espace de pâturage jusqu’au 20e siècle.

Lors de l’urbanisation à l’Est à partir des années 1960, et la pointe de l’île Beaulieu étant plus sujet aux crues de la Loire, il est décidé de l’aménager en parc paysager : elle devient le Circuit Rustique d’Activité en Plein Air (CRAPA) en 1985. Considéré comme le plus « naturel des parcs nantais », c’est à la fois l’habitat d’une faune et d’une flore liées à la Loire, mais aussi un lieu de promenade familiale grâce à l’installation d’équipements divers (jeux, BBQ...).

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L’urbanisation de l’île Beaulieu

Quelques années après la Seconde Guerre mondiale, la pression démographique rend prégnant le besoin de nouveaux logements à Nantes. L’île Beaulieu est le dernier territoire vierge de l’espace urbain car sa situation en dehors du port ne lui a pas permis de bénéficier d’aménagements. Elle n’a ni quais ni enrochements pour la défendre du fleuve qui l’inonde toujours une partie de l’année. A cause de cette situation, la ville a de nombreuses fois reculé devant l’ampleur des travaux à réaliser pour l’urbaniser.

Mais en 1961, les 116 ha de l’île Beaulieu sont remblayés et rehaussés de 5 mètres pour être mis hors de portée des crues. Ce projet colossal permet d’édifier en quelques années de nouveaux immeubles dont la stabilité est assurée par des pieux forés à presque 20 mètres dans le lit de la Loire.

En 1970, le projet évolue : de nouveaux équipements sont ajoutés, dont l’Hôtel de Région. Ces opérations continuent dans les décennies qui suivent, dans l’objectif d’attirer les Nantais dans ce nouveau quartier, aujourd’hui occupé par plus de 20 000 habitants.

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L’hôtel de Région, un marqueur du paysage

Toujours dans la perspective de créer un quartier attrayant, ce dernier va se munir d’équipements publics à destination de ses habitants, mais également symboliques pour le territoire.

En 1977, la région Pays de la Loire naît. Pour marquer l’émergence de ce nouveau territoire administratif, le président du Conseil régional, Olivier Guichard, souhaite regrouper les services régionaux dans un seul et même bâtiment.

En 1981, un concours d’architectes est alors lancé pour construire ce nouvel hôtel de région. Le choix se porte sur le projet de Ménard, Thibault, Soulard et le cabinet 3A.

A la fois très moderne par ses matériaux et ses formes encadrant un espace de 15 000m2, il rappelle malgré tout des édifices plus classiques par son énorme dôme de verre sous lequel se trouve l’hémicycle de 250 places où se tiennent les assemblées.

L’œuvre de François Morellet, portail 0°-90°, 8°-98°, symbolise deux éléments majeurs : la Loire, représentée par le portail bleu, et l’édifice, symbolisé par le portail noir incliné, tel un écho aux immeubles du centre-ville penchés en raison des mouvement du fleuve, et donc, au sable qui constitue l’île Beaulieu.

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Un nouveau franchissement

Le quartier sort progressivement de terre, mais ce dernier reste isolé par la Loire. Il n’est alors accessible que par la première ligne de ponts datant du Moyen Age, du pont Général Audibert, (ancien pont de la Madeleine) au Nord, au pont de Pirmil, au Sud.

Un des objectifs : désenclaver l’île Beaulieu, puisque la ville est consciente que cet axe unique deviendra vite insuffisant pour les nouveaux habitants du quartier.

Une ligne de ponts supplémentaire est alors construite dès 1966. Les ponts Aristide Briant et Georges Clemenceau, reliés par le boulevard Général De Gaulle, deviennent ainsi un axe majeur permettant d’accéder directement au centre-ville.

En 2004, la densification du territoire entraîne de nouveaux besoins de circulation. Un impressionnant pont métallique plat à haubans, nommé pont Eric Tabarly, est mis en œuvre par l’architecte Marc Barani et inauguré en 2011. Il relie l’île Beaulieu au quartier Malakoff et à la gare de Nantes.

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Promenade sur les berges…

Après avoir aménagé l’île Beaulieu, en cherchant à y créer un espace de vie propice à le venue de nouveaux habitants, un autre enjeu est alors apparu : trouver une place nouvelle à la Loire, qui perd son rôle maritime et industriel dans les années 1960. Vide de ses bateaux, il faut lui trouver de nouveaux usages, notamment pour les habitants.

Depuis les années 2010, la ville de Nantes cherche à créer de nouveaux liens avec son fleuve, notamment en installant des espaces de circulation et de loisirs sur ses berges. Un nouvel aménagement est donc réalisé sur les rives de l’île de Nantes à partir de 2014. En plus d’offrir un nouvel espace partagé entre cyclistes et piétons, cette promenade des berges permet aux Nantais de se rapprocher de leur fleuve. Conçu comme un balcon ouvert sur la Loire, c’est aussi l’occasion d’y découvrir des espèces sauvages (saules, peupliers, frênes, aulnes…) et d’y faire une petite balade…

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Le quartier Malakoff – Pré Gauchet

En 1961, la création de la ZUP Malakoff Beaulieu permet aux aménageurs de disposer de 19 ha sur l’ancienne prairie des Mauves.

Ces terrains étaient jusque-là restés majoritairement ruraux car l’urbanisation liée à l’ouverture de la gare d’Orléans en 1853 était limitée entre les rives du canal saint-Félix et le viaduc ferroviaire marquant la limite du territoire de la ville. En 1944, le quartier est bombardé par les alliés. La Reconstruction fait sortir de terre quelques grands immeubles avant que la cité Malakoff, composée de 11 tours de 16 étages, ne s’élève lors de la décennie suivante.

De 2001 à 2012, la Ville de Nantes développe le quartier Malakoff et le lie aux 164 ha du Pré-Gauchet, le secteur de la gare. Le quartier est alors relié à l’île Beaulieu par les nouveaux ponts Eric Tabarly et Willy Brandt, les logements sont rénovés (notamment ceux de la cité HLM) et le quartier est doté de nouveaux équipements.

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Le bassin du Tripode

Le quartier du Tripode tient son nom d’un immeuble construit en 1972 par Jean Dumont. En raison de la présence d’amiante dans le bâtiment, les dernières occupants sont évacués en 1994. Sans trouver de nouvel acquéreur, il est cédé à la Ville de Nantes pour un euro symbolique, qui décide de le raser en 2005. Suite à cela, le quartier fut donc totalement remanié.

Dans ce nouvel aménagement, les espaces publics ont été conçus autour de l’eau, en accord avec le désir de renouer avec la Loire. C’est donc dans cette perspective que deux bassins paysagers de 2000 et 1800m² sont installés au centre des trois nouveaux immeubles du Tripode. Alimentés en eau de pluie, ces dernières sont filtrées grâce à plusieurs plantes, issues de la biodiversité de la Loire (massettes, joncs fleuris, nénuphars, noues d’aulnes). La qualité de l’eau est également assurée par des pompes mécaniques actionnées par deux éoliennes.

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Le palais des sports de Beaulieu

Inaugurée en 1973, cette salle de 5000 places, conçue par Georges Evano et Jean-Luc Pellerin comme une véritable salle de spectacle, a plusieurs particularités architecturales.

D’abord, la grande portée de sa structure métallique sur 86 m recouverte de verre. La salle, quant à elle, est composée d’un rectangle central inséré dans une forme d’hexagone, permettant d’installer bien plus de spectateurs sur les longs pans.

A l’extérieur, l’édifice est recouvert de noir et de rouge, faisant ainsi ressortir ses formes et le démarquant du paysage. Le Palais des sports de Beaulieu a reçu de nombreux prix, notamment celui du prix européen de l’architecture métallique en 1977.

Dans cette même perspective de faire renaître le quartier Tripode-Viviani, le palais des sports fut étendu et rénové à partir de 2015.

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Le jardin des cinq sens

Lieu créé en 1984, le jardin des cinq sens a été réaménagé en 2015, avec plusieurs îlots : l’île argentée, l’île sauvage et l’île colorée. On y retrouve des décors variés, allant des bruissements des saules qui sollicitent l’ouïe, les fleurs et vivaces parfumées faisant travailler l’odorat, des champs colorés qui aiguisent la vue, des framboisiers évoquant le goût… Ce jardin unique de 6000m² a été récompensé en 2018 de la Victoire d’or du paysage dans la catégorie jardins et parcs urbains.

A proximité se trouve le lycée Nelson Mandela, construit en 2014. François Leclercq, architecte parisien à l’origine de ce bâtiment dit « à énergie positive » (il produit plus d’énergie qu’il n’en consomme), l’a conçu comme une grande rue intérieure en ossature de bois et recouverte d’un toit en verre.

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Le centre commercial Beaulieu

Le centre commercial Beaulieu est aujourd’hui le témoignage de l’expansion qu’a connu le quartier Beaulieu dans la seconde moitié du 20e siècle.

Sa construction est décidée en 1975, mais ériger un immense bâtiment sur 5m de remblais encore récent est risqué. Les architectures ont donc élevé le centre commercial Beaulieu -et l’ensemble des immeubles du quartier – sur des pieux plantés dans le rocher situé à 20m de profondeur, selon une technique employée sur les îles de Loire depuis le 18e siècle.

En 2008, l’architecte Patrick Bouchain agrandit l’édifice qui devient le second plus grand centre commercial de Nantes, après Atlantis : une entrée monumentale est créée sur le boulevard Général de Gaulle. En 2016, une nouvelle rénovation lui ajoutent des panneaux solaires sur son toit, lui permettant de produire de l’énergie pour 80 foyers. Des dalles végétales pré-cultivées fournissent une isolation thermique en plus de stocker les eaux pluviales.

Reflet du succès de l’aménagement du quartier, le centre commercial est passé du statut de magasin de périphérie nantaise à celui de centre commercial ouvert sur la ville.

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Le boulevard Général De Gaulle

Le boulevard Général de Gaulle, une des artères majeures de l’île de Nantes, délimite l’île Beaulieu. Il est inauguré en 1966, en même temps que la seconde ligne de ponts. Aujourd’hui, il est à la fois emprunté par les bus, les voitures, les piétons et les cyclistes, notamment depuis son réaménagement en 2005.

Au numéro 20 se dresse un bâtiment atypique. Composé de verre et de fer, cet ancien garage a été édifié entre 1987 et 1989 selon les plans du cabinet Barto et Barto. Le verre, choisi par économie de moyen, laisse apparaître la structure du bâtiment. En 2010, le garage déménage, laissant place à l’école de numérique YNOV.

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Le Jardin des Fonderies

Véritable écrin de verdure sous un squelette de métal, le Jardin des Fonderies marque l’entrée du quartier industrialisé de l’île de Nantes. Centre névralgique de l’économie industrielle de la ville au 19e siècle, le quartier industriel occupait l’ancienne île de la Prairie-au-Duc. Les entreprises s’y étaient installées sur des terrains inondables et peu chers pour pouvoir bénéficier de la proximité du port. L’augmentation permanente du trafic portuaire incita l’État à construire des quais et à remblayer de nombreux terrains tandis que la ville bâtissait des ponts et ouvrait des rues pour aménager l’île.

Créée en 1895 par les frères Babin-Chevaye, la Société de fonderie de fer et de fonte, devenue par la suite la Nantaise des Fonderies, s’installe sur la Prairie-au-Duc en 1905. Dotée d’un four d’une capacité de 20 tonnes, elle se place parmi les premières fonderies françaises et se spécialise dans la construction navale.

La fonderie est fragilisée par la crise pétrolière et par le recul de la construction navale dans le port de Nantes. Le bâtiment est liquidé en 1980 : les ateliers et les bureaux sont détruits. Seules subsistent les halles élevées en 1937 et 1954. Le site reste à l’abandon comme de nombreuses friches industrielles qui témoignent du déclin du port maritime de Nantes à partir des années 60. Vingt années seront nécessaires pour que la ville puisse trouver une nouvelle destination à cet ancien quartier industriel. Entre mémoire et avenir, le projet de l’île de Nantes naît en 2004. C’est dans cet esprit que les fonderies sont aménagées, en 2009, en un jardin qui évoque les voyages des navires nantais : nef, fours, pont roulant et cuves de moulages sont conservées, restaurées, et servent aujourd’hui d’habitat pour de nombreuses plantes exotiques.

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