L’incidence des climatiques sur les systèmes alimentaires

Comprendre les défis et les risques que les changements climatiques posent aux systèmes alimentaires traditionnels des communautés éloignée

La pauvreté alimentaire menace d’atteindre des niveaux de plus en plus dangereux alors que les répercussions des changements climatiques partout au pays s’intensifient et s’accélèrent, minant l’accès des peuples autochtones à la nourriture et aggravant les résultats en matière de santé.

– Séance d’information du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord sur la sécurité alimentaire dans les communautés nordiques, Human Rights Watch

Au fil des siècles, les peuples autochtones du Canada ont entretenu un lien profond avec leurs terres et leurs systèmes alimentaires traditionnels, favorisant une sécurité alimentaire collective et des pratiques d’intendance durables. Toutefois, de nos jours, de nombreux facteurs ont des effets négatifs sur les communautés autochtones et leur mode de vie traditionnel. Les conséquences cumulatives des changements climatiques, combinées aux défis posés par la pandémie de COVID-19, aux perturbations de la chaîne d’approvisionnement, à la flambée des prix des aliments, aux répercussions industrielles et à l’empiétement du gouvernement et de l’industrie sur les terres traditionnelles, ont exacerbé l’insécurité alimentaire et réduit la souveraineté alimentaire des communautés autochtones. Dans ce contexte, les changements climatiques se distinguent comme étant un perturbateur majeur qui affecte les systèmes alimentaires traditionnels des Autochtones et le réseau complexe de sources alimentaires interconnectées.

Peuples autochtones du Canada

Au Canada, il existe trois groupes ou identités autochtones distincts : les Premières Nations, les Inuits et les Métis.

Carte des Inuits Nunangat. Crédit:  Statistiques Canada, 2021 

Le terme « Premières Nations » désigne un groupe diversifié composé de plus de 630 communautés, représentant plus de 50 Premières Nations et parlant plus de 50 langues au Canada.  [1]   Il s’agit du plus grand groupe d’Autochtones au Canada, comptant plus de 1 000 000 membres.  [2]  

Les Inuits sont un peuple autochtone qui vit principalement dans quatre régions inuites du Canada, appelées collectivement l’Inuit Nunangat. Ces régions englobent la terre, l’eau et la glace qui s’étendent de l’extrême ouest de l’Arctique en passant par le Nunavut et le nord du Québec, jusqu’aux rives est de Terre-Neuve-et-Labrador.  [3]  

Les Métis sont un peuple autochtone distinct ayant une culture, une histoire et une langue uniques, et leur territoire comprend les voies navigables de l’Ontario, qui encercle les Grands Lacs et qui couvre ce qu’on appelait auparavant le Nord-Ouest. La Nation métisse est composée des descendants de personnes nées d’unions entre des femmes des Premières Nations et des hommes européens.  [4]  

Premières Nations

Métis

Inuits

Population autochtone totale

Population de 2021

1,048,405

624,215

70,540

1,807,250

Pourcentage de la population totale du Canada

2.9%

1.73%

0.19%

5.0%

Profil de la population autochtone provenant du recensement de la population de 2021 de Statistique Canada.   [2]  


Systèmes alimentaires traditionnels et souveraineté alimentaire

Avant d’aborder les changements climatiques, il faut d’abord comprendre la signification des systèmes alimentaires traditionnels et de la souveraineté alimentaire dans les communautés autochtones.

Depuis d’innombrables générations, les systèmes alimentaires traditionnels jouent un rôle crucial dans l’identité, la culture et la santé des peuples autochtones. Les aliments traditionnels sont ceux récoltés sur la terre et dans l’eau. Non seulement les activités de récolte assurent la subsistance, mais elles revêtent une grande importance culturelle, car elles favorisent un sentiment d’appartenance et de lien avec les terres ancestrales et relient les Autochtones à leur patrimoine et à leurs traditions..  [6]  

Exemples d’aliments traditionnels : baies, poisson, phoque et caribou.

Les communautés autochtones dépendent de diverses sources alimentaires traditionnelles propres à leur territoire. Leur régime alimentaire traditionnel varie considérablement, la viande et le poisson occupant une place importante dans presque tous les régimes alimentaires autochtones, tandis que les plantes comestibles diffèrent d’une nation à l’autre.

En voici quelques exemples : gibier sauvage (p. ex., caribou, orignal, chevreuil et petits mammifères comme le lapin, l’écureuil terrestre et le castor), oiseaux, fruits de mer, poissons (p. ex., omble chevalier, saumon, hareng), mammifères marins (p. ex., phoques, baleines, narvals) et plantes (p. ex., baies et autres fruits, légumes et plantes médicinales).  [6]   Il existe de nombreux autres exemples, et chaque communauté possède ses propres techniques, traditions et lieux de récolte. Dans l’ensemble, les aliments traditionnels sont plus nutritifs et plus économiques que les produits alimentaires fabriqués pour le marché dans le système alimentaire industriel.  [6]  

Aqpiks (chicoutés), canneberges et corégone mi-fumé récoltés à Inuvik (Territoires du Nord-Ouest).

Remarque : Il existe divers termes (aliments traditionnels, aliments prélevés dans la nature, aliments sauvages, aliments culturels) pour décrire les aliments récoltés sur la terre, dans l’air et dans l’eau. Le terme utilisé dépend du contexte. Par exemple, dans les lois et réglementations provinciales du Canada, on parle d’aliments sauvages ou de gibier sauvage. Le terme « aliments traditionnels » est souvent privilégié par les peuples des Premières Nations tandis que l’expression « aliments prélevés dans la nature » est surtout employée par les Inuits.  [6]  

Souveraineté alimentaire

D’abord définie par La Vía Campesina, un mouvement en Amérique latine, la souveraineté alimentaire est « le droit des peuples à une alimentation saine et culturellement appropriée produite avec des méthodes durables, et le droit des peuples de définir leurs propres systèmes agricoles et alimentaires ».   [5]  

Alors que les effets des changements climatiques continuent d’exacerber le problème de l’insécurité alimentaire dans les communautés autochtones nordiques éloignées partout au Canada   [7]  , la souveraineté alimentaire est de plus en plus présentée comme solution potentielle.  [8]   Les peuples autochtones ont souligné le lien important entre la souveraineté alimentaire et la résilience de leurs communautés face aux changements climatiques, soulignant la nécessité de soutenir la récolte traditionnelle et la production alimentaire locale.  [5]  

Diverses activités de récolte et de préparation.


Insécurité alimentaire dans les communautés autochtones

Selon la définition de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’insécurité alimentaire est l’incapacité de se procurer de la nourriture pour répondre aux besoins et aux préférences alimentaires. Elle est également définie ainsi par le Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique : L’insécurité alimentaire se manifeste lorsque des facteurs indépendants de la volonté d’une personne (d’ordre économique, social, environnemental ou géographique) l’empêchent d’avoir suffisamment de nourriture pour assurer son bien-être.  [9]  

Partout au Canada, les familles autochtones sont beaucoup plus susceptibles de se retrouver en situation d’insécurité alimentaire, principalement en raison de la marginalisation historique et des répercussions du colonialisme.  [5]   Une multitude de facteurs, dont le faible revenu, les coûts élevés du logement et de l’énergie, les défis en matière de transport, le prix élevé des aliments sur le marché, les coûts élevés du carburant, ainsi que le manque d’accès ou le déclin de l’accès aux aliments traditionnels constituent des obstacles à la sécurité alimentaire dans le Nord. En 2023, près de la moitié (48 %) des Autochtones ont déclaré avoir souffert de la faim au cours des 12 derniers mois en raison d’un manque d’argent pour se nourrir, comparativement à 15 % de la population blanche. Les taux d’insécurité alimentaire enregistrés avant la pandémie atteignent 50 % pour les personnes vivant dans les réserves et jusqu’à 76 % pour les Inuits vivant dans l’Inuit Nunangat.  [10]  

En 2023, 12 % des personnes qui ont eu recours aux banques alimentaires sont des Autochtones, même si les peuples autochtones ne représentent que 5 % de la population générale.

Rapport Bilan-Faim 2023 de Banques alimentaires Canada

En réponse à l’insécurité alimentaire croissante dans les communautés nordiques, le gouvernement du Canada a mis sur pied en 2011 le programme Nutrition Nord Canada afin de rendre les aliments périssables et nutritifs plus accessibles et abordables pour les habitants des communautés nordiques isolées admissibles au programme qui n’ont pas accès au transport de surface (routes, chemins de fer ou voies maritimes) toute l’année. Toutefois, dans le Bilan-Faim 2023, Banques alimentaires Canada exhorte le gouvernement de continuer d’examiner le programme Nutrition Nord Canada afin de déterminer les raisons pour lesquelles il n’atteint que minimalement ses objectifs de réduction du coût des aliments dans le Nord, et de s’efforcer d’envisager des façons novatrices de mieux soutenir les communautés.

Avant la pandémie de COVID-19, les coûts pour les besoins essentiels comme la nourriture, le transport et le carburant étaient déjà élevés dans les régions éloignées et nordiques. Ces coûts ont monté en flèche en raison de la pandémie, puis de l’inflation rapide que nous avons connue au Canada au cours des deux dernières années. Selon l’organisme caritatif Canadian Feed the Children, la hausse de 9 % des prix des aliments que connaît la population générale représenterait l’équivalent d’une hausse de 20 % pour les communautés autochtones éloignées.  [10]  

Prix élevés des aliments dans les épiceries du Nord.


Perte de sources alimentaires traditionnelles liée au climat

Au cours des dernières décennies, le pourcentage d’aliments récoltés à partir de sources traditionnelles dans le régime alimentaire autochtone a diminué en raison de la diminution de l’accès à la terre, de la perte du savoir-faire pour la récolte, de l’augmentation des coûts ou des restrictions sur la chasse ainsi que du recours accru aux aliments achetés en magasin. Cependant, de nombreuses communautés autochtones continuent de compter sur les aliments traditionnels comme base de leur alimentation globale. Pour contourner la hausse de l’insécurité alimentaire, de nombreuses communautés ont tenté d’améliorer l’accès aux aliments traditionnels, qui sont historiquement plus nutritifs, moins coûteux et plus importants sur le plan culturel que les aliments du marché (achetés en magasin). Cette démarche devient toutefois de plus en plus difficile en raison des effets des changements climatiques.

Les changements climatiques ont des effets néfastes sur les peuples autochtones au Canada et perturbent considérablement leurs systèmes alimentaires et le réseau alimentaire interconnecté.  [7]   Même si les peuples autochtones du Canada comptent parmi les plus faibles émetteurs de gaz à effet de serre, des études universitaires montrent qu’ils sont parmi les plus exposés aux répercussions des changements climatiques.  [5]   Le Canada se réchauffe environ deux fois plus que la moyenne mondiale, et ses régions nordiques, où se trouvent de nombreuses communautés autochtones, se réchauffent encore plus rapidement.

Même si les peuples autochtones du Canada comptent parmi les plus faibles émetteurs de gaz à effet de serre, des études universitaires montrent qu’ils sont parmi les plus exposés aux répercussions des changements climatiques.

Crise climatique et droit à l’alimentation des Premières Nations au Canada, Human Rights Watch

En 2019, le ministère fédéral de l’Environnement et du Changement climatique a commandé un rapport qui prévoyait des saisons de neige et de glace plus courtes, des températures de plus en plus chaudes et le dégel du pergélisol partout au pays. Pour mettre en lumière la gravité de ces tendances, le dégel du pergélisol provoqué par les changements climatiques et l’augmentation des feux de forêt poussent les puits de carbone historiques comme les vastes forêts boréales au nord du Canada au bord du gouffre, faisant d’eux des émetteurs nets de carbone. Plusieurs écosystèmes subarctiques clés, qui abritent de nombreuses sources alimentaires traditionnelles, risquent déjà d’atteindre des points de bascule climatiques. S’ils dépassent ces points de bascule, ils seront incapables de se remettre des conséquences d’un réchauffement rapide.  [5]  

Nous examinerons d’autres effets des changements climatiques sur les sources alimentaires traditionnelles dans la partie suivante.

Changements dans la disponibilité des espèces

Les communautés ont observé une baisse importante de la quantité d’animaux et de plantes disponibles pour la récolte en raison des changements climatiques. L’évolution de la glace et du pergélisol, les feux de forêt, le réchauffement de la température de l’eau et les conditions météorologiques imprévisibles sont quelques-uns des nombreux facteurs qui ont influé sur la disponibilité des espèces près des communautés autochtones.

Évolution des habitudes de migration 

De nombreuses communautés qui comptent encore beaucoup sur la chasse, la pêche et le piégeage traditionnels ont remarqué des changements dans les habitudes migratoires et l’emplacement des animaux qu’elles chassent, pêchent ou trappent.

Réduction des populations animales et végétales 

Les plantes comme les baies et les animaux comme l’orignal, le caribou, le phoque et le saumon sont des sources alimentaires de base pour de nombreuses communautés. Caribou : Certains troupeaux de caribous sont en déclin en raison de la détérioration de leur habitat et de perturbations humaines accrues, principalement causées par l’exploitation des ressources. Ils sont particulièrement vulnérables aux effets du climat, comme l’augmentation du givrage en hiver, le décalage de la période printanière, la modification de la qualité et de la quantité de fourrage et le harcèlement accru par les insectes en été. Ces effets nuisibles attribuables aux changements climatiques accélèrent probablement le déclin de certaines populations de caribous.  [5]    Saumon : Les changements climatiques affectent d’importantes zones habitables pour le saumon au Canada, car leur migration, leur fraie, leur incubation et leur croissance sont sensibles aux variations des niveaux d’eau et aux hausses de température. Les températures plus élevées dans les rivières ont une incidence négative sur les populations de saumon et les faibles niveaux d’eau rendent la fraie plus difficile.  [5]    Baies et autres plantes : Les changements de température affectent la culture des baies et des plantes utilisées pour la nourriture et la médecine traditionnelle. Par exemple, dans certaines régions, la répartition des baies a changé, les quantités produites ont diminué ou les plantes ont été sujettes à des maladies.  [5]  

Nouvelles espèces 

Certaines communautés ont même découvert de nouvelles espèces inconnues de plantes, d’oiseaux et d’autres animaux sur leurs territoires traditionnels. Par exemple, le temps plus chaud a entraîné la migration de certains oiseaux migrateurs plus au nord, et certaines communautés côtières ont observé de nouvelles espèces de poissons en raison du réchauffement des eaux.  [5]  

Difficultés d’accès aux zones de récolte

L’évolution des conditions météorologiques, des conditions de glace, des feux de forêt et du niveau de l’eau influe sur la capacité des pêcheurs d’accéder aux sources alimentaires traditionnelles de façon sécuritaire, rapide et rentable.  [5]   Certaines communautés ont adapté leurs méthodes de chasse et de pêche et ont déplacé leurs camps pour suivre la migration des animaux dans l’espoir de fournir à leurs familles et à la communauté des aliments traditionnels ainsi que des connaissances à transmettre aux générations futures.  [11]    Les répercussions des changements climatiques entraînent des situations météorologiques de plus en plus extrêmes et imprévisibles, ce qui rend les activités de récolte plus difficiles, voire plus dangereuses, pour les peuples autochtones. Ces défis devraient s’intensifier avec le réchauffement du climat.  [5]  

Saisons de récolte plus courtes

La dégradation des conditions de neige et de glace a pour effet de raccourcir la durée de la glace solide et le couvert de neige adéquat essentiels au transport en motoneige, un moyen couramment utilisé pour la chasse à l’orignal et au caribou. Au printemps et en été, les feux de forêt réduisent parfois l’accès aux zones de récolte pendant de longues périodes.  [5]  

Conditions de chasse dangereuses et difficiles 

Les conditions météorologiques imprévisibles posent des défis aux chasseurs qui dépendent du savoir traditionnel, de sorte qu’il est difficile de se déplacer en toute sécurité sur des surfaces potentiellement dangereuses pour accéder aux terrains de chasse. L’amincissement de la glace sur les cours d’eau augmente le risque de bris pour les cueilleurs qui y circulent, entraînant des blessures et des pertes d’équipement. La plus grande fréquence des tempêtes, des inondations et des conditions météorologiques imprévisibles amplifie les dangers associés à la récolte, ce qui a pour conséquences de réduire la quantité de nourriture récoltée et d’empêcher les jeunes de se joindre aux activités et d’apprendre d’importantes méthodes de récolte.  [5]  

Augmentation des coûts liés aux changements climatiques

Snowmobiler on a hunting trip with extra fuel

Déplacement en motoneige transportant une réserve de carburant.

Le carburant et les articles de chasse sont essentiels pour que les communautés puissent chasser sur leurs terres. Toutefois, la récolte est coûteuse, car elle exige d’acheter et d’entretenir de l’équipement, des véhicules de transport, du carburant et des provisions pour la chasse, le piégeage ou la pêche. Pour tenir compte des conditions météorologiques imprévisibles, il est nécessaire de prévoir des réserves de nourriture, de carburant et de marchandises. Les variations dans les conditions de neige et de glace peuvent nécessiter de modifier les itinéraires traditionnels, entraînant possiblement une augmentation des dépenses en carburant et des trajets plus longs. De plus, les changements dans les habitudes migratoires des animaux augmentent la probabilité de devoir effectuer plusieurs voyages.  [5]   Étant donné que les membres de la communauté doivent consacrer de plus longues périodes à la récolte d’espèces qui sont plus éloignées ou qui se trouvent dans des endroits inconnus, le coût de la récolte s’étend également à la perte de temps de travail et d’étude.

Solutions de rechange limitées aux sources alimentaires traditionnelles

Unloading nonperishable foods off of a shipping crate in Kangiqtugaapik

Livraison de denrées non périssables « du marché » à la banque alimentaire de Kangiqtugaapik.

Les répercussions des changements climatiques sur la capacité des peuples autochtones à se procurer des aliments traditionnels sont aggravées par la limite des solutions de rechange nutritives et abordables disponibles. Les aliments du marché (épicerie) sont la principale solution de rechange aux aliments traditionnels, mais leurs prix sont particulièrement exorbitants dans les communautés éloignées et nordiques en raison de nombreux facteurs comme les coûts élevés de transport et d’exploitation.  [5]  

De nombreuses communautés du Nord ont un accès limité ou inexistant aux routes, certaines ayant mis au point des réseaux de routes d’hiver et de routes de glace. Elles n’ont généralement qu’une fenêtre de trois à quatre mois pour y transporter des marchandises, dont des articles dont la taille ou le poids font en sorte que le coût du fret aérien dépasserait la valeur des articles eux-mêmes. Ces réseaux de routes de glace sont la principale source de livraison de biens et de produits, y compris de nourriture. Toutefois, les changements climatiques affectent la stabilité et l’accessibilité des routes d’hiver. À mesure que ces routes deviennent de moins en moins fiables en hiver en raison du réchauffement, les communautés dépendent de plus en plus du transport aérien coûteux pour livrer de la nourriture, ce qui fait bondir le coût des aliments achetés en magasin.  [5]  

Les coûts exorbitants du transport ont une incidence importante sur l’accessibilité des aliments nutritifs, en particulier les fruits et légumes. Dans les marchés nordiques, les fruits et les légumes (qu’ils soient frais, surgelés ou en conserve) ont tendance à être beaucoup plus coûteux que les aliments transformés et peu nutritifs achetés en magasin, comme les aliments riches en sucre, en gras et en amidon (p. ex., céréales, produits céréaliers, croustilles et bonbons). Cet écart de prix peut s’expliquer par le fait que les fruits et légumes sont plus susceptibles d’être altérés pendant l’expédition, qu’ils ont une durée de conservation plus courte et qu’ils exigent des températures contrôlées pendant le transport et l’entreposage. En revanche, les aliments transformés moins nutritifs sont généralement secs, résistants à la détérioration et ont une durée de conservation stable.  [5]   Par conséquent, pour de nombreuses communautés, la façon la plus économique d’obtenir des aliments nutritifs est souvent de se procurer des aliments traditionnels.


Adaptation des communautés

Les changements climatiques ont forcé les communautés autochtones à s’adapter. Bon nombre d’entre elles ont lancé des initiatives visant à faciliter la cueillette d’aliments traditionnels et à réaménager leur communauté pour faire face aux changements climatiques. Plusieurs communautés militent pour un meilleur accès à des denrées fraîches de grande qualité, à des aliments traditionnels ou à des produits qu’elles pourraient cultiver elles-mêmes. Les situations alimentaires idéales à l’échelle communautaire sont holistiques et multidimensionnelles. Les serres, les programmes de littératie alimentaire, le soutien aux repas, l’agriculture à petite échelle et les carrefours alimentaires pourraient faire partie des solutions. [12] 

OLD CROW, YUKON

À Old Crow, une communauté autochtone éloignée du Yukon, les membres de la communauté ont remarqué des changements importants dans le paysage et les comportements des animaux et des plantes en raison des effets des changements climatiques. Cette courte vidéo explique leur situation et la façon dont ils font face à ces défis.

CBC : Aperçu des défis liés aux changements climatiques et des mesures d’adaptation des communautés à Old Crow, au Yukon.

PREMIÈRE NATION DÉNÉE DES CHIPEWYANS DES PRAIRIES, ALBERTA

Pendant très longtemps, le peuple de la Première Nation dénée des Chipewyans des Prairies, dans le nord de l’Alberta, mettait à profit le lac Gipsy pour pêcher des poissons et s’assurer ainsi une nourriture saine en hiver. Toutefois, depuis la création du système de réserve, la base administrative de la Nation se trouve à Janvier 194, soit à environ 50 kilomètres au sud-ouest du lac Gipsy. Un autre plan d’eau appelé lac Winefred, situé plus près de Janvier 194, est devenu un secteur de pêche de plus en plus convoité par la communauté et la traditionnelle collecte de nourriture au lac Gipsy a progressivement pris fin. Au fil des décennies, le sentier abandonné menant au lac Gipsy a été envahi par la végétation.

Fishing in Gipsy Lake Alberta under the northern lights

Pêche au lac Gipsy.

L’an dernier, afin d’améliorer l’accès à une autre source de poisson pour les communautés éloignées et mal desservies, Banques alimentaires Canada a versé des fonds à la Première Nation dénée des Chipewyans des Prairies afin de restaurer le sentier historique du lac Gipsy. Grâce à une subvention rendue possible par le Fonds d’urgence pour la sécurité alimentaire d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, la Première Nation dénée des Chipewyans des Prairies a embauché des ouvriers locaux et loué de l’équipement pour dégager environ 25 kilomètres de route et rendre à nouveau praticable cet accès au lac essentiel à la pêche traditionnelle.


Changements nécessaires pour l’avenir

En raison de l’augmentation du coût du logement et de la nourriture, ainsi que des effets continus des changements climatiques, le problème de l’insécurité alimentaire dans le Nord devrait s’aggraver au cours des prochains mois et des prochaines années. Les mesures annoncées dans le cadre du programme Nutrition Nord en 2018, dont de nouvelles mesures d’aide aux programmes d’activités de chasse et de cueillette traditionnelles (mesures encouragées par Banques alimentaires Canada) ainsi que la création d’un nouveau groupe de travail entre les Inuits et la Couronne qui se penchera sur les enjeux à venir, sont bien accueillies, mais ne permettront probablement pas de régler les multiples problèmes des communautés nordiques. En outre, cette situation est aggravée par la récente flambée de l’inflation alimentaire et du coût de la vie.

Banques alimentaires Canada, ainsi que de nombreuses banques alimentaires du réseau, font de leur mieux pour soutenir les communautés nordiques en difficulté, mais les coûts d’expédition élevés dépassent leur financement déjà limité, surtout en raison des récentes pressions inflationnistes. Les solutions relatives aux prix des aliments et à l’alimentation en général ne peuvent pas tout régler. Le gouvernement fédéral doit également revoir l’ensemble de son approche quant aux causes profondes à long terme de l’insécurité alimentaire dans le Nord pour que des progrès soient réalisés.


Au total, Banques alimentaires Canada investit un million de dollars par année pendant trois ans dans des initiatives de renforcement des capacités et de sécurité alimentaire dans le Nord dans le cadre de ses efforts continus visant à améliorer l’accès aux aliments dans toutes les régions du pays.

Banques alimentaires Canada tient à remercier la Fondation Walmart pour le financement de cette initiative de cartes narratives.

Déplacement en motoneige transportant une réserve de carburant.

Livraison de denrées non périssables « du marché » à la banque alimentaire de Kangiqtugaapik.

Pêche au lac Gipsy.

Carte des Inuits Nunangat. Crédit:  Statistiques Canada, 2021 

Exemples d’aliments traditionnels : baies, poisson, phoque et caribou.